Vic-en-Bigorre



Bibliographie * Documents (textes) * Documents (graphiques)
Introduction de l'ouvrage paru en 2001, toujours en vente dans les bonnes librairies. Ce travail contient des monographies « archéologiques » et historiques des quinze communes de la communauté de communes Echez-Montanerez.
 
 

Patrimoine... en VAL D'ADOUR
 
 

Stéphane ABADIE
 
 

VIC-EN-BIGORRE ET SA REGION
 
 
 
 

Editions du Val d'Adour
 
 

2001
 
 
 
 

INTRODUCTION






La petite cité de Vic-en-Bigorre, depuis plus de deux siècles, a donné naissance à de nombreux chercheurs locaux. Curieusement, aucun des érudits travaux publiés n'a abouti à l'édition d'un ouvrage de synthèse accessible à un large public. Ce modeste ouvrage tente de combler, bien imparfaitement, cette lacune en donnant à l'habitant comme au touriste quelques « clés de lecture » du paysage et de l'histoire de cette partie de la plaine de l'Adour.
 
 

J'ai choisi de ne parler que des communes faisant partie de la communauté de communes Echez-Montanérès et du canton de Vic-en-Bigorre. Ce choix ne correspond à aucune unité physique ou historique ancienne, mais constitue un espace « pratique » dont tout point est facilement accessible en quelques minutes depuis Vic-en-Bigorre.
 
 

Les thèmes choisis ici sont forcément réducteurs. Le thème central, l'habitat, est peut-être curieux. Il m'a cependant semblé original et porteur de nombreuses autres thématiques. L'amateur d'histoire trouvera sans doute que les commentaires sont souvent sommaires, et il aura raison. Le but de ce travail est de fournir une vue d'ensemble et j'espère qu'il aidera à sensibiliser les bigourdans et les visiteurs à un patrimoine par trop méconnu, fragile et menacé. L'orientation bibliographique, en fin d'ouvrage, permettra au curieux de compléter ses connaissances dans la plupart des thèmes traités.
 
 

UN PEU DE GEOGRAPHIE...






La région de Vic-en-Bigorre, au nord de Tarbes, peut se définir très simplement comme un fragment d'une petite plaine encadrée par deux séries de coteaux pratiquement orientés nord-sud. Cette topographie trouve son origine dans le cours de la rivière Adour et de ses affluents, qui irriguent encore toutes les basses terrasses. La géologie se ressent aussi de cette origine: les lourds terrains argilo-siliceux contiennent d'innombrables galets roulés pendant des milliers d'années par les cours d'eau depuis les montagnes. Seuls quelques bancs de molasse1et de calcaire gréseux à flanc de coteau, intercalés avec de larges bancs argileux, viennent compléter ce tableau et expliquent que les bigourdans ne sont pas allés chercher bien loin leurs matériaux de construction (sauf exceptions notables, comme pour les marbres antiques): galets, briques, chaux (provenant de la calcination du calcaire), terre crue et sable de l'Adour ont servi à bâtir les murs, l'argile cuite a été employée pour les tuiles et la céramique.
 
 

PETITE HISTOIRE DES HOMMES ET DE L'HABITAT






La préhistoire et la protohistoire de la région sont très mal connues: les travaux en cours sur la région de Ger (tumulus de Lamarque-Pontacq) et de Sénac apporteront peut-être quelques éléments d'informations sur les sociétés pyrénéennes de ces périodes reculées. On peut seulement affirmer sans risque qu'à la veille de l'occupation romaine, les «aquitains», proches des celtibères, vivaient sur les hauteurs de plusieurs collines fortifiées de puissants fossés et talus de terre, formant des oppida7protégeant des villages aux maisons de terre et de bois ( à Saint-Lézer, Lagarde, Soublecause...). Quelques noms de villages, comme Sanous (Senos en 1429) ou Andrest comportent des terminaisons et des racines prélatines caractéristiques, qui révèlent une occupation du sol certainement dense mais occultée par l'occupation postérieure et les noms aquitano-latins et médiévaux.
 
 

L'occupation romaine (peut-être plus culturelle que « physique ») a laissé d'importantes traces: un puissant réseau de chemins orthogonaux d'origine antique probable quadrille la plaine et sert d'armature à nos routes actuelles. Les noms de propriétés antiques sont légion, facilement reconnaissables par leur terminaison en -acum ou –anum (par exemple Nouilhan peut se comprendre comme une déformation de Nobilianum, le domaine d'un nommé Nobilis).

La colline du Castetbieilh, à Saint-Lézer, est alors le centre principal de cette région, petite ville fortifiée d'une puissante enceinte de pierre citée au 4e siècle. A ses pieds, sur un gué de l'Echez et au carrefour de la route qui mène de Tarbes (Tarba) à Aire-sur-Adour (Aturum), une petite agglomération commerçante se développe, un vicusqui garde encore le nom caractéristique de Vic(-en-Bigorre). Dans la campagne environnante, une série de riches exploitations, des villae13, servent à cultiver des centaines d'hectares de terres et côtoient des « cabanes » très modestes de colons ou d'esclaves, habitats dont les traces se retrouvent en prospection. Ces modestes paysans devaient cultiver quelques lopins de terre, soit pour le compte des maîtres des villae, soit pour leur propre compte en marge de ces énormes propriétés. Une douzaine de ces villae ont été repérées sur le territoire de l'actuelle communauté de communes.
 
 

Le haut moyen-âge est très mal connu: on sait par les travaux de l'archéologue Roland Coquerel que la « ville » de Bigorra (à Saint-Lézer) se maintient à l'abri de ses murailles, alors que plusieurs villae semblent détruites et abandonnées à partir du 4e ou 5e siècle (à Pujo, Maubourguet...). Les sarcophages de pierre retrouvés dans de nombreux villages (sarcophages fabriqués dans la région de Lourdes vers les 6e-8e siècles, dans la carrière du Béout) indiquent cependant le maintien de hameaux près des villae et dans le vicus, et la christianisation progressive de l'ensemble de la population, peut-être à partir du noyau Saint-Lézer / Vic (églises à dédicaces très anciennes: Martin et Erex (?) à Vic, monastère haut-médiéval à Saint-Lézer...).
 
 

La documentation écrite, qui commence à (ré)apparaître au 11e siècle, permet de préciser le paysage du début du moyen-âge: de nombreux hameaux plus ou moins groupés autour de modestes églises, contrôlant des terroirs de l'ordre d'une centaine d'hectares. On relève aussi ponctuellement des exploitations agricoles isolées, nommées casaux, pouvant former de véritables hameaux dotés parfois d'une chapelle ou église. Sans pouvoir en préciser les modalités, on constate que la plupart de ces minuscules localités évoluent en moins de trois siècles, soit en disparaissant, soit en se structurant sous l'effet d'un seigneur ou d'autres événements. Aux 13e et 14e siècles, quand sont réalisées les premières enquêtes fiscales complètes du comté de Bigorre (les censiers), la plupart des villages actuels sont constitués.

L'analyse des plans de ces villages montrent quelques types bien particuliers:

Certains villages sont parfois groupés autour d'une église, parfois dans l'enclos circulaire du cimetière, comme à Camalès, Gayan ou Baloc (commune de Vic). C'est là l'effet de la législation des papes du 11e siècle, la Paix de Dieu: les paysans, protégés par l'Eglise, bâtissent leur demeure contre l'église ou dans l'enclos sacré du cimetière, inaugurant une curieuse cohabitation entre vivants et morts.

     
    Beaucoup de villages sont structurés autour ou à partir d'un château primitif, une motte castrale, motte de terre ou plate-forme ceinturée de fossés et surmontée d'une tour et de bâtiments, logis d'un seigneur. C'est le cas par exemple à Pujo (le Puyo désignait cette motte, détruite récemment). Ces logis et donjons étaient souvent bâtis en bois primitivement, et furent pour certains reconstruits en pierre.

    D'autres villages ont fait l'objet d'un lotissement systématique de la part d'un seigneur et/ou d'une communauté: c'est le cas d'Andrest et du quartier de l'église à Vic-en-Bigorre.

Remarquons immédiatement que la plupart de ces villages ont conservé des habitats non groupés pendant tout le moyen-âge et l'époque moderne, et que plusieurs communes dont l'habitat semble dispersé sont en fait la réunion de plusieurs noyaux villageois disparus et « éclatés ». 

Notons également que de nombreux canaux ont été creusés dans cette période pour alimenter une série de moulins à grain ou à foulon, accessoirement des champs ou des fossés de fortifications.
 
 
 
 

Notons enfin le caractère frontalier de cette marge de l'ancien comté de Bigorre: le castrum de Vic fut selon certaines sources fondé vers 1152 pour prévenir les coups de main des « enemies deu Bearn ». Le château de Montaner, construit au cœur d'une petite vicomté passée au 11e siècle -par mariage- de la Bigorre au Béarn, fut rebâti au 14e siècle par Gaston Fébus pour surveiller la Bigorre (alors sous contrôle du roi de France) et les voies d'accès vers le comté de Foix et ses annexes. La disparition du castrum Bigorra (à Saint-Lézer) au 11e siècle, au profit de Tarbes, a peut-être aussi un lien avec ces problèmes frontaliers multiséculaires.
 
 

Le 16e siècle marque un premier coup d'arrêt dans la lente évolution villageoise: les Guerres de Religion entraînent la destruction presque systématique des églises et villages du nord du comté. La reconstruction, assez lente, se fait souvent sans respecter les schémas d'occupation du sol hérités du moyen-âge. Les vieilles murailles, rendues inutiles au 17e siècle par la généralisation des canons et la politique royale, sont progressivement démantelées. 
 
 

Au 18e siècle, la prospérité revenue notamment grâce au vin et au blé, les constructions se multiplient, en particulier de beaux hôtels particuliers à Vic-en-Bigorre, et des retables de style baroque19 dans les églises. Le visage des villages se transforme profondément, l'habitat se structurant désormais en fonction des voies de communication (en particulier les routes royales percées dans cette période: Maubourguet-Vic-Tarbes et Vic-Rabastens-Auch) et des impératifs des cultures. C'est en 1790 que le canton de Vic-Bigorre est créé, succédant à un « quarteron » d'ancien régime (circonscription administrative et judiciaire), donnant sa première unité politique et administrative à l'ensemble des communes étudiées dans cet ouvrage.
 
 

Le milieu du 19e siècle marque un deuxième coup d'arrêt: la « fuite » des jeunes vers la ville et ses usines ou vers les Amériques, la crise agricole, le phylloxera et l'oïdium qui détruisent les vignes divisent en un siècle la population par deux ou trois dans la plupart des communes: les constructions de fermes se raréfient, on se contente souvent de réparer et de compléter les bâtiments existants, on abandonne les autres. C'est également dans cette période que commence à s'affaiblir la langue locale, une variante du gascon, au profit du français.
 
 

Le mouvement ne s'est inversé que depuis une trentaine d'années: le baby-boom de l'après-guerre, le retour vers la campagne d'une population urbaine, la facilité de transport liée aux voitures personnelles, la volonté d'avoir des maisons individuelles expliquent en grande partie la remise en état des vieilles fermes pour en faire des logements principaux ou secondaires, et le lotissement de vastes espaces autrefois cultivés autour de Vic, en particulier autour des voies et des nœuds de communication donnant accès à Tarbes et Maubourguet (sous la forme d'établissements industriels et de lotissements individuels).
 
 


MONOGRAPHIES COMMUNALES...

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Pour me contacter: stephane.abadie@ac-toulouse.fr


Dernière modification : 18/11/01,18:47:28

1molasse: roche friable proche du calcaire, servant à fabriquer de la chaux, plus rarement employée comme matériau de construction de qualité médiocre
 
7oppidum (plur. oppida): fortification protohistorique, souvent une colline aux flancs retaillés et à l'accès barré par un ou plusieurs fossés et murs de terre (ou éperon barré). 
 
13villa (plur. villae): exploitation rurale antique, comprenant des bâtiments et des terres. La villa comprenait deux ensembles, la pars rustica, comprenant les installations agricoles et le logement des employés et esclaves, et la pars urbana, logement du propriétaire souvent orné de marbres et de mosaïques.
 
19baroque: style artistique du 17e et 18e siècle, caractérisé par la richesse ornementale et des motifs, le jeu sur les couleurs et la lumière (emploi de l'or) etc.