Montégut-Arros



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Monographie de Montégut-Arros (Gers)

 7-Le cimetière paroissial

 Le cimetière se trouvait au nord de l'église paroissiale, sans doute sur son emplacement médiéval. Il est mentionné à plusieurs reprises dans le livre terrier de 1755. En 1840, le père Joseph Esparros explique que le cimetière n'est pas clôturé et qu'il sert souvent de « pâturage public » au bétail malgré ses récriminations.

 En 1827, Jean Barada, conseiller  à la cour des comptes et propriétaire à Montégut, fit don à la commune « d'un terrain inculte situé [...] au versant du bois au levant du moulin neuf, d'une superficie de 480 mètre carrés, pour l'établissement d'un cimetière ». La mairie accepta dans un premier temps ce projet, qui nécessitait l'établissement d'un nouveau chemin.
Un plan fut établi en 1854, mais le projet échoua finalement, car le nouveau cimetière était trop éloigné de l'église (plus de 600 mètres!), l'ancien cimetière (de 218 mètres carrés) suffisait encore aux besoins et les habitants étaient hostiles au déplacement des sépultures. 

 Le besoin se fit cependant sentir dans les années 1876 d'une réorganisation de ce terrain, car l'emplacement prévu pour construire la mairie-école devait empiéter sur cet espace, désormais trop étroit.

 Il fallut attendre 1883 pour que la situation change. Cette année Jean-Pierre Bonneau fit don d'une vigne voisine du cimetière, la « vigne de Vilandreau » rachetée en 1879 à la veuve Gauté, pour établir un cimetière plus grand et mieux organisé, sous réserve de conserver deux concessions pour lui et l'ancienne propriétaire.

 L'acte d'acceptation du projet a été conservé en plusieurs exemplaires:

« L'an mil huit cent quatre vingt trois et le vingt mai, le conseil municipal de Montégut s'est réuni au lieu ordinaire de ses séances, sous la présidence de M. de Maire, pour la session de Mai.
Etaient présents M.M. Bergez, Caussade, Castay, Delord, Galin, Pujos, Sénac Dominique, Sorbet et Laporte, Maire.
Mr le Président donne connaissance au conseil municipal d'une donation faite à la commune d'un terrain pour agrandir le cimetière par Mr Bonneau rentier à Montégut, et dont cette donation aurait été acceptée à titre conservatoire par Mr Caussade alors maire en mil huit cent soixante dix-neuf.
 Considérant que la construction d'une maison d'école a eu pour conséquence d'immobiliser une partie du terrain appartenant au cimetière et que, ainsi réduit, il est insuffisant pour les inhumations et pour satisfaire les demandes de concessions faites par les habitants pour établir des sépultures de famille;
 Considérant qu'il est de toute nécessité d'augmenter son étendue par l'annexion d'autre terrains qui ne peuvent être pris qu'à l'ouest vue la disposition topographique des lieux;
 Considérant que la superficie du cimetière a été réduite encore par la rectification autorisée d'un chemin vicinal;
 Considérant que le terrain le mieux approprié pour cet agrandissement appartient au sieur Bonneau propriétaire et rentier à Montégut-Arros, qui se refus à en consentir la vente, mais qu'il préfère, sa belle position de fortune le lui permettant, en faire donation à la commune.
 Considérant que cette donation est faite par le sieur Bonneau, sous certaines réserves et avec l'engagement d'exécuter à ses frais les travaux de terrassement, par acte public, en date du quinze mars mil huit cent soixante dix neuf, retenu par maître Sérès, notaire à Villecomtal;
 Considérant qu'il y a lieu, avant d'accepter la donation du sieur Bonneau, d'examiner si elle est avantageuse pour la commune, où si, vues les réserves faites par le donataire, elle ne constituerait pas plutôt une charge qu'un avantage;
 Considérant que le terrain donné par Mr Bonneau,  à l'ouest du cimetière actuel et lui faisant suite est d'une contenance de seize ares environ et d'une valeur de [blanc].
Que les travaux de terrassement faits par le sieur Bonneau pour frais peuvent être évaluées à [blanc].
Qu'un mur de clôture élevé par le donateur à ses frais [blanc].

 Considérant que la réserve faite par Mr Bonneau de trente-huit mètres carrés de ce terrain pour y établir deux sépultures de famille, l'une pour lui, l'autre pour la dame Gautée et sa famille, se chiffre à raison de soixante francs le mètre carré, à la somme de 2280 frs.
 Considérant que l'écart entre ce que donne le sieur Bonneau à la commune et la partie qui en est distraite pour être annexée à la maison d'école, en attendant le moment prochain où les finances de la commune lui permettront de faire bâtir un mur de clôture, les souscripteurs portés sur le livre de souscription annexé au dossier, prennent l'engagement de faire construire une palissade de deux mètres de hauteur.
 Mr le maire propose au conseil municipal d'accepter l'offre faite par les souscripteurs.
 Considérant que la construction d'un clocher s'impose et que pour être effectuée, cette construction nécessitera un empiétement nouveau sur le terrain du cimetière, qui aura pour conséquence de réduire davantage sa superficie déjà trop exiguë, ce qui placerait la commune dans la nécessité d'agir par voir d'expropriation coûteuse pour obtenir l'étendue nécessaire aux inhumations et pour un passage indispensable.
 Pour ces motifs;
 Le conseil, vu l'état précaire des finances communales, et l'impossibilité d'un agrandissement du cimetière même à titre onéreux, les meilleures conditions d'hygiène dans lesquelles se trouvera l'école communale par l'annexion du terrain Bonneau, accepte la donation faite par ce dernier comme étant très avantageuse et ratifie l'acceptation à titre conservatoire, faite par Mr le Maire, ainsi que la souscription faite pour la construction de la palissade».
 
 Un plan est réalisé la même année et en août 1884, toutes les formalités étant réglées, le cimetière est réorganisé, des allées sont tracées, les concessions nouvelles sont accordées.

 Les derniers travaux connus remontent à 1911-1913: des murs de clôture furent ajoutés (en particulier celui servant de séparation avec l'école), réalisés par le maçon Bernard Barra, sous le contrôle de l'architecte Beccas. Ils ont été restaurés en 1984.

8-Les cimetières disparus

 Nous avons mentionné plus haut le projet de cimetière formé en 1827 dans le quartier du moulin, mais qui n'aboutit pas.

 Un cimetière existait par contre autour de l'église de Notre-Dame au quartier de la Carce, au pied du château. Il est mentionné à plusieurs reprises dans le terrier de 1755, et fut probablement désaffecté à la Révolution, lors de la démolition de la chapelle Notre-Dame.

Un autre cimetière existait également à l'église disparue connue par le toponyme la gleysasse. Cazauran rapporte à propos de ce site la découverte d'un sarcophage.

 Je ne sais par contre s'il existait un lieu d'inhumation autour de l'église Saint-Martin près du Lurus, ou même auprès du lieu de culte Saint-Aloÿ.
 

9-La chapelle funéraire de Jean-Pierre Bonneau

 L'actuel cimetière paroissial se distingue par la présence d'un remarquable monument funéraire de style néo-roman implanté à l'ouest de l'église.

 Cette belle chapelle en pierre blanche (une sorte de calcaire blanc d'importation) est de plan barlong. Elle est posée sur un socle maçonné entouré d'une balustre en fer forgé. L'accès se fait par un petit escalier à l'est, qui s'élargit progressivement. Le lien avec le reste de la plate-forme est assuré par des bandes de ciment aux lignes sinueuses, au ras du sol.
 De plan très simple, cet édifice occidenté1 est composé d'une nef unique accessible à l'ouest par une porte étroite précédée de deux marches. Deux fenêtres à vitraux, centrées au nord et au sud de l'édifice et une rosace en pierre à l'ouest procurent un éclairage suffisant. 
 L'animation extérieure de l'édifice est assurée par des bandes de maçonnerie en décrochement aux angles et au niveau des fenêtres, et une moulure à mi-hauteur. Dans la partie supérieure, une élégante corniche sert de support aux décors du toit: un faux clocheton, des fleurons sur socle, un lanternon semblable à une lanterne des morts et des tourelles néogothiques.

 Le décor se concentre sur la façade: la porte est encadrée de colonnes entièrement sculptées de croisillons en méplat, et surmontée d'un tympan portant un Christ encadré de deux enfants priant. Le Christ bénit d'une main et pose l'autre main sur la tête d'un enfant.
 La partie supérieure est ornée de motifs de vignes et acanthes entrelacés en méplat. Les angles, en saillie, portent deux orants, figures élégamment drapées et surmontées de dais. Sur les côtés, la décoration se limite aux ouvertures: sortes « d'alfices » surmontant les fenêtres nord et sud, forme en chrisme de la rosace ouest.

 A l'intérieur de l'édifice, l'absence de décor peint se note en même temps que la teinte sombre du plafond cimenté, manifestement rebâti après un effondrement. Deux décrochements de maçonnerie au niveau des fenêtres se poursuivent en arcs doubleaux sur la voûte en arc surbaissé. Le sol est carrelé de motifs géométriques polychromes. Les vitraux, de belle facture, représentent saint Pierre, gardien des clés du Paradis, et sainte Anne, une dévotion particulière du commanditaire (c'était le nom de son épouse).

 L'autel, au fond de l'édifice, est composé d'un placage de marbre. Assez délabré, il est formé d'un autel orné de trois arcades « romanes » sur colonnettes en façade, et surmonté d'un tabernacle à degrés dont la croix a disparu. Deux meubles de sacristie en bois, en forme de tours, complètent ce mobilier.
Il est à noter que le brancard funéraire et le corbillard de la paroisse sont conservés là.

Plan de la chapelle funéraire de Jean-Pierre Bonneau et de son socle, cimetière de Montégut-Arros:

 L'abbé Cazauran signale cette chapelle de la manière qui suit: « A l'ouest de l'église, beau tombeau en pierre de Chauvigny blanche (bâti en 1879). La voûte s'est effondrée. Procès. Il y a à l'intérieur un petit autel en marbre blanc. Sépulture de la famille Bonneau ».
 Cet édifice est assez bien documenté. Il fut construit pour Jean-Pierre Bonneau, riche propriétaire de Montégut à la fin du 19e siècle. La date donnée par Cazauran est sans doute inexacte. Les archives du cimetière indiquent que le site fut aménagé à partir de 1884 (la donation ayant été faite en 1879). Par contre l'origine de la pierre employée, et le procès pour l'effondrement de la voûte expliquent bien les réparations constatées sur le terrain.

 On est ici en présence d'un bâtiment caractéristique de la bourgeoisie de la fin du 19e siècle: le goût du paraître, de montrer sa fortune et sa supériorité sociale s'étalent jusque dans la mort, par l'emploi d'un matériau lointain et coûteux, la qualité des sculptures, du décor... De fait, la chapelle tranche encore aujourd'hui sur le petit peuple enterré tout autour dans des tombeaux bien plus modestes. D'une certaine façon, Jean-Pierre Bonneau a importé dans sa petite patrie le goût parisien pour les monuments de prestige, tels qu'ils s'étalent par exemple dans le fameux cimetière du Père-Lachaise.

 La comparaison avec la concession Gauté, contemporaine et bâtie immédiatement au sud, est éclairante: une simple balustre en fer forgé dotée d'une croix en métal isole un espace gravillonné, sans ostentation. Il est vrai que cette concession perpétuelle était destinée à une veuve sans doute peu fortunée...
 
 La municipalité a demandé le classement de cette chapelle funéraire au titre de monument historique en 1983.

10-Les croix du village
 
 Les croix ont toujours eu une importance particulière. Symboles de la foi chrétienne, elles furent implantées depuis le moyen âge pour marquer les lieux importants: carrefours, quartiers, limites de paroisse, lieux de culte ou cimetières existants ou disparus, espaces protégés par l'église (sauvetés).

 A Montégut la documentation a conservé la trace de plusieurs croix disparues.
Une Monjoye et une Croix au quartier de Caillau sont mentionnés dans le terrier de 1755. La monjoie était un lieu de dévotion à un lieu précis, marqué par une croix, un édicule protégeant une statue, plus rarement une chapelle ou même un simple tas de pierre.
 Une autre croix disparue est mentionnée dans un acte de 1827, dans le quartier du moulin: « la croix placée sur la pelouse de l'aouarde »2. Cette croix a pu marquer l'emplacement de l'église Saint-Martin disparue. Au sud de la paroisse, à la limite de Saint-Sever, un toponyme « la croix rouge » rappelle l'existence d'une croix disparue. Le père Esparros explique enfin en 1840 que le cimetière est doté d'une croix en bois, qui fut remplacée à la fin du siècle par la croix actuelle.

 Il existait jusque dans les années 1950 de nombreuses croix, souvent en bois, qui marquaient les carrefours et les quartiers, qui ont aujourd'hui complètement disparu. Au moins cinq croix disparues existaient au quartier du Lurus, souvent pour marquer les groupements de maisons: à Pejoy, chez Lucantis, aux Arrolans, sur la route de Villecomtal, chez Bergeret...

D'autres croix sont toujours debout. 
 Dans le cimetière communal, une grande croix en fer forgé sur socle de pierre marque le caractère sacré du lieu. De petits motifs symboliques (soleil...) viennent en compléter le sens.

 Au niveau du chevet de l'église Notre-Dame-de-l'Assomption, une autre croix en fonte moulée, également du 19e siècle mais dans le goût du siècle précédent, marque aussi le lieu. Un angelot, une Vierge à l'Enfant, un ciboire... décorent avec goût cette belle oeuvre.
C'est la seule croix répertoriée dans l'inventaire réalisé par Jean et Annie Castan3.

 Ce n'est cependant pas la seule. En effet d'autres croix peuvent être vues au bord des chemins du village:
Le monument aux morts porte une croix, elle même ornée d'une croix de guerre « suspendue » en trompe-l'oeil
une croix en fer forgé et fonte moulé marque le carrefour du quartier de Saillères
une croix en fonte moulée sur une « colonne » en ciment, portant une Vierge, marque la limite avec Moumoulous
une autre croix du même type, portant un Christ en croix , subsiste au bord du chemin qui sépare la commune de Fréchède
une dernière croix, posée près d'une maison sur un modeste socle en ciment, marque l'emplacement du chemin qui permet d'accéder à l'église paroissiale. 

 On peut également signaler la présence d'une croix gravée sur un contrefort nord de l'église paroissiale, marquant l'emplacement d'une sépulture.
 

Le monument aux morts

 Élément caractéristique des communes de France, le monument aux morts fut construit dans le cimetière, au pied du clocher dans les années 1920-19254. De construction très simple, il est composé d'une croix sur un imposant socle. Seul élément non-religieux, la croix est décorée d'une autre croix, de guerre celle-là sculptée avec son ruban, comme si on l'avait posée là. Le socle est également orné d'un casque de type « Adrian » , devant une épée et une branche de laurier, qui rappellent avec sobriété la raison de ce monument commémoratif.
 

 La liste des disparus est éloquente. La commune a payé un lourd tribut à la patrie:

LAMON Marie-Madeleine infirmière major 1918
BERGERET Edouard    1914
SOUBIRAN Maxime    1914
LARRIEU Victor     1914
TOURNIS Auguste     1914
JOURNE Louis     1915
DUFFARD François     1915
GALIN Isidore     1917
BURGUES Léon     1917
DESPAUX Augustin     1917

Une main plus malhabile a rajouté postérieurement le nom des morts de la deuxième guerre mondiale:

CASTAY Eugène     1940
SEMBRE Abel
 

 A l'intérieur de l'église, une plaque en terre cuite (?) peinte, placée en face du portail, sert également  de mémorial. Il porte la formule « Aux héros de la grande guerre morts pour la France », avec un motif de soldat devant un clocher et la liste des disparus.
 

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Dernière modification : 1/03/02