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Maîtrise d'histoire. Monographies du canton de Vic-en-Bigorre
 ANDREST

Code INSEE 65320007
Canton de vic-en-Bigorre
carte IGN 1745 Ouest de Tarbes
Documents 1-1 à 1-

Le village d’Andrest se trouve dans la plaine de l’Adour, sur un sol d’alluvions argilo-siliceuses. 
Le territoire communal est limité au Nord par celui de Pujo, à l’Est par les territoires de Marsac et 

Le village

Le village se présente sous la forme d’une juxtaposition de fermes avec granges et jardins, semi-dispersées. Cependant l’observation du cadastre napoléonien ( voir document  ) permet d’observer un ensemble de rues et de parcelles régulièrement orientées, avec l’église paroissiale au centre. Un second ensemble est formé par les fermes qui s’alignent le long de la CD 935 ( à l’Est du village ) au Nord et au Sud. Un «  halo «  d’habitations entourent ces deux structures reconnaissables, ainsi qu’un grand lotissement en construction au Nord-Ouest du village. Deux sites castraux sont repérables, l’un au Sud du village, l’autre à l’écart au Nord-Ouest, près de la route menant à Siarrouy.

Par un hasard exceptionnel, un ensemble de chartes concernant ce village a été conservé dans le recueil appelé Livre Vert de Bénac. (1).

Le village d’Andrest apparait dans les textes en 1272, date à laquelle le vicomte de Lavedan Garsie IV échange au comte Esquivat de Bigorre la vallée de Barèges contre les villages de Prexac, Bagès, Vier, Andrest,Troignan, et 2300 sols morlans (2).
En 1281, le creusement du canal de la Gaou destiné à alimenter un moulin à Andrest est l’occasion d’un acte notarié passé entre le seigneur d’Andrest et le seigneur d’Oursebelille Pierre d’Antin. (3).
En 1285 Andrest est cité comme villagia (4).
En 1303 une charte nous apprend que le vicomte de Lavedan demande le déplacement du village en offrant des places à bâtir, moyennant quelques concessions (5).
En 1330, les villageois demandent la sauvegarde royale pour Andrest, pour une raison ignorée (6).
En 1340 une nouvelle charte est octroyée, qui demande la reconstruction du village «  in barbaquana dicti castri «  (7). Cette charte est tout à fait intéressante, notamment dans le préambule en gascon demandant le respect des fors et coutumes des habitants (8), qui nous apprend qu’à ce moment le village est séparé en deux quartiers disctincts, le barri deu casted près du château, et la bielhe d’Andrest proprement dite.

On sait que vers 1569 le village est détruit et l’église incendiée, pendant les troubles des Guerres de religion. ( ).

Il ne subsiste aucun habitat médiéval à Andrest, à l’exception notable d’une maison qui possède des fenêtres à meneau, une porte en pierre à montants chanfreinés et un fronton mouluré sur le mur aveugle Nord. Du fait de l’absence de moulures sur les ouvertures, nous datons cette maison de la fin du XVIème ou du début du XVIIème siècle, ce qui correspondrait à l’époque de reconstruction du village.

L’Eglise saint-Barthélémy.

En 1330 l’assemblée des Andrestois se fait «  in ecclesia beati Bartholomei de Andresto «, les personnes ayant été «  congregati ad sonum campane, ut moris est « . le pouillé de 1342 mentionne une ecclesia de Andresto, promue au rang de siège d’archiprêtré, et en 1379 la paroisse est dite pauvre.

L’église aujourd’hui visible ne semble conserver que quelques éléments en remploi. On notera en particulier les arcades d’un clocher-mur conservées dans le clocher-tour, en pierres calcaires appareillées en plein-cintre mais avec une mouluration qui rappelle les arcades gothiques ( Camalès... ), peut-être datables de la fin du XIIIème siècle. L’église possède également une sorte de bénitier en calcaire gris dont le pied est constitué de deux bases de colonnes superposées ( à motif  de tore à griffes d’angle, comme on en trouve à Morlaas dès le XIème siècle et dans les cloîtres tarbais au XIIème siècle ). Cependant l’emploi inhabituel de ce calcaire gris en plaine, et les traces nombreuses de laye et de boucharde nous incitent à penser qu’il s’agit d’une copie moderne. 
Détruite au XVIème siècle, l’église fut très restaurée au XVIIIème siècle, par l’adjonction d’un énorme clocher-tour qui s’appuya sur le clocher-mur médiéval, faisant office de narthex . On remploya en entrée monumentale un arc en calcaire gris ( à appareil à refend ) surmonté d’un fronton, datables de la fin XVIème-XVIIème siècle, provenant du château d’Andrest démantelé ( ).

Cette église est dotée aujourd’hui d’une vôute en bois, suite à l’effondrement au XXème siècle de la vôute de pierre dont ne subsiste qu’un arc doubleau.

La motte d’Andrest.

Au Nord-Ouest du village actuel, elle a été en grande partie détruite  par une dérivation du canal de la Gaou. Il n’en subsiste qu’une motte tronquée placée à l’angle sud-Est d’une plateforme quadrangulaire délimitée par un fossé. Sans doute antèrieure au canal qui la détruit lentement, nous nous demandons si cette dérivation du canal n’a pas été voulue au XIIIème siècle pour alimenter en eau les fossés de la plateforme aujourd’hui presque comblés. Nous n’avons trouvé qu’une seule mention documentaire de cette motte, qui est qualifiée en 1303 de «  casted ancia « , sans doute par opposition au «  castet « ( ).

Le «  Castet « 

Au Sud du village, ce site est bien lisible sur le cadastre de 1808 et sur le terrain.
Il s’agit d’une grande plateforme rectangulaire d’environ trois mètres de haut, en terre et entourée d’un large fossé récemment comblé. Ces fossés ont pu être alimentés en eau par le canal de la gaou qui passe à quelques mètres à l’ouest du site.

La plateforme est aujourd’hui occupée par une ferme moderne, mais on peut encore voir d’épais murs médiévaux ( environ un mètre ) faits de galets liés au mortier, et au Sud des bases de galets et de briques signalant l’accès primitif par un pont. 

Au Sud de la plateforme nous avons trouvé des tessons de céramique rouge guillochée ( XIVème siècle ) et des morceaux de terre cuite non identifiés signalant un habitat médiéval disparu.

Le territoire communal.

Le territoire communal présente quelques toponymes intéressants: prats debat ( les prés de derrière ), les vignes, le bosquet rappellent l’usage des terres par les villageois, crabaro au Sud peut se rapporter à l’élevage ovin ( crabarou, le chevreau ). Les hosses ( les fosses ) rappellent l’existence de fosses communes creusées au XIXème siècle. On nous a également signalé à l’Est du village un champ des crestias, seul souvenir d’un habitat des cagots.

Plus intéressant, au Sud du territoire communal existe un chemin de Trougnan, signalant l’emplacement d’un village disparu. Le village est échangé au vicomte de Lavedan en 1272 ( voir plus haut ). En 1614, Guillaume Mauran dit que «  durant la vie dudit Arnaud de Lavedan, fut fait le changement ou transmigration du lieu de Troignan au lieu ou est maintenant le lieu d’Andrest, de telle façon que le terroir de Trougnan demeura dépeuplé de maisons et réduit en labourage, et jusqu’aujourd’huy a été la métairie du château d’Andrest. »

L’église de Trougnan est citée en 1342: «  Item archipresbiter de Orleixo habeat sub se capellanos et ecclesias (...) de Troinhano «, mais n’est plus citée ensuite.

Au Nord-Est du village, au bord de la CD 935 existe également une rue de Saint-Vincent. Une église Saint-Vincent existait là, dans le cimetière duquel les habitants d’Andrest étaient enterrés jusqu’en 1740, alors que l’église paroissiale possédait aussi un cimetière. Cette église fut rasée lors de la construction au XVIIIème siècle de la CD 935. Des travaux de réfection effectués il y a quelques années, ont permis à l’ancien instituteur de repérer deux murs parallèles orientés Est-Ouest, ainsi que de nombreuses inhumations dont ceraines avec des coquilles Saint-Jacques.
Nous avons pu observer dans un trou pratiqué au Nord de la route dans un jardin un angle de mur ( abside à fond plat ? ) affleurant, ainsi qu’une inhumation en decubitus dorsal, le squelette étant placé avec la tête en direction de l’abside de l’église, et reposant sur un sol en mortier de tuileau gallo-romain. Nous avons retrouvé là et dans les jardins proches des tessons de céramique à paroi fine gallo-romaine, des tessons de céramique blanche médiévale, et de la céramique moderne.

On nous a signalé divers sites antiques ( présences de tegulae, de tessons d’amphores... ) dans les champs situés le long de la voie antique dite la poutge, à l’Est du village ( voir annexe ).

Essai de synthèse

L’importante documentation et les vestiges archéologiques nous permettent de tenter une reconstitution sommaire de l’histoire de cet intéressant village.

Un noyau de peuplement a pu se former le long de la voie antique de la poutge, sous la forme d’au moins une villa et d’autres habitats.
Au haut-moyen-âge la villa du quartier Saint-Vincent a dû regrouper quelques habitats autour d’un lieu de culte, dans les ruines de la villa antique. On peut émettre une hypothèse semblable pour expliquer la formation du village de Trougnan.

A une époque indéterminée ( XIème siècle ? ) une motte s’est installée près d’Andrest- Saint-Vincent.
 Au XIIIème siècle nous savons que le territoire communal est propriété comtale, et passe à la fin de ce siècle aux vicomtes de Lavedan. A ce moment le nouveau seigneur décide de refonder les villages d’Andrest et de Trougnan, sous la forme d’un castelnau. Le cadastre napoléonien montre nettement le parcellaire régulier créé pour l’occasion, sous la dépendance du site castral créé au Sud, et entouré d’eau grâce au canal du moulin et une dérivation entourant le site. Une nouvelle église est également fondée. 
En 1340 le seigneur décide le regroupement des habitations dans la « barbacane «  du château, peut-être pour des raisons d’insécurité. Nous identifions cette barbacane à la zone cultivée au Sud du « castet «. Manifestement cette tentative de regroupement échoua, peut-être à cause de l’éloignement des terres cultivées, ou d’un retour à l’habitat antérieur après la fin des troubles.
Le village fut vraisemblablement détruit pendant les guerres de Religion, ce qui explique l’absence de maisons antérieures au XVIème siècle.

Le village actuel résulte de ces différents évènements, avec des fermes subsistant à l’emplacement de l’ancien castelnau, des habitats qui se développent le long de la route CD935 créée au XVIIIème siècle, et, retour curieux de l’histoire, un lotissement moderne qui se développe près de l’ancienne poutge sur les habitats gallo-romains.
 

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Dernière modification : 18/11/01,08:24:17